La pré habilitation opératoire

La préhabilitation peut avoir de nombreux bénéfices financiers et médicaux pour les hôpitaux et les patients. Elle peut aider à réduire les coûts de soins à long terme, améliorer la santé des patients et leur qualité de vie, et accélérer leur récupération. Malgré tout, elle nécessite un investissement en temps et une coordination pluridisciplinaire qui peut se relever difficile. 

Général
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20.7.2023

Qu'est ce que la pré habilitation ? 

En France, il y a environ 1,2 millions de chirurgies lourdes et environ 30% des patients ont des complications. Sur ces 30%, on estime à environ 50% la part des complications évitables. Cela représenterait un coût total évitable d'environ 900 000 000 euros par an.

La préhabilitation chirurgicale est un ensemble de techniques et de interventions médicales qui visent à préparer le patient à une chirurgie en améliorant sa condition physique et mentale avant l'intervention. Cela peut inclure des programmes d'exercice physique, des modifications de l'alimentation et de la nutrition, des injections de fer, un sevrage tabagique, un traitement de l'apnée du sommeil, ainsi que des conseils psychologiques pour aider le patient à gérer le stress et l'anxiété liés à la chirurgie. L'objectif de la préhabilitation chirurgicale est d'aider le patient à se remettre plus rapidement de la chirurgie et à réduire les complications péri opératoire. Par exemple, un patient qui se prépare à une chirurgie cardiaque pourrait suivre un programme d'exercice physique sous la supervision d'un professionnel de la santé pour améliorer sa condition physique ou demander un programme personnalisé pour se sevrer avant l'intervention ce qui peut aider à réduire les risques liés à la chirurgie.

Il est important de noter que la préhabilitation chirurgicale n'est pas recommandée pour tous les patients et tous les types de chirurgies. Elle est généralement utilisée pour les chirurgies lourdes et "intermédiaires" et les patients ayant des conditions médicales préexistantes, comme l'obésité, le diabète, l'anémie ou les maladies cardiaques, qui peuvent augmenter les risques liés à la chirurgie.

En outre, la préhabilitation chirurgicale doit être adaptée à chaque patient en fonction de ses besoins et de sa condition physique. Par exemple, un patient souffrant d'obésité pourrait suivre un programme d'exercice physique et de perte de poids avant une chirurgie, tandis qu'un patient souffrant de maladies cardiaques pourrait suivre un régime alimentaire spécial et des exercices de renforcement cardiaque. Il est important que la préhabilitation chirurgicale soit supervisée par un professionnel de la santé qualifié pour s'assurer que le patient reçoit les soins les plus appropriés.

Enfin, il est important de souligner que la préhabilitation chirurgicale ne garantit pas l'absence de complications liées à la chirurgie, mais peut simplement réduire les risques pour le patient en améliorant sa condition physique et mentale avant l'intervention. C'est pourquoi il est important de discuter avec son médecin de la pertinence de la préhabilitation chirurgicale dans chaque cas individuel.

Comment mettre en place un parcours de pré habilitation au sein de mon établissement ? 

Pour mettre en place un parcours de pré habilitation au sein de votre hôpital, voici les étapes à suivre :

  1. Définissez le but du parcours de pré habilitation : il s'agit de préparer les patients à une intervention chirurgicale en optimisant leur état de santé avant l'opération.
  2. Identifiez les patients qui peuvent bénéficier du parcours de pré habilitation : cela concerne généralement les patients qui présentent des risques de complications liées à la nature de l'opération ou qui ont besoin d'une préparation physique ou mentale spécifique avant l'intervention car ils présentent des facteurs de risques.
  3. Établissez des protocoles de pré habilitation : il doivent définir les différentes étapes des différents parcours, les objectifs à atteindre et les professionnels de santé impliqués.
  4. Organisez les consultations et les soins pré opératoires : ils peuvent inclure des consultations médicales, des examens complémentaires, des séances de rééducation, etc.
  5. Assurez le suivi des patients : il est important de suivre l'évolution de l'état de santé des patients et de s'assurer qu'ils sont prêts pour l'opération.
  6. Évaluez le parcours de pré habilitation : il est important de mesurer l'efficacité du parcours en analysant les résultats obtenus (taux de complications, durée de séjour à l'hôpital, etc.).

Il est recommandé de travailler en étroite collaboration avec l'ensemble des professionnels de santé impliqués dans le parcours de pré habilitation afin de garantir une prise en charge optimale des patients. La pluridisciplinarité est essentielle !

Des bénéfices multiples

Il y a de nombreux bénéfices financiers et médicaux associés à la mise en place de parcours de préhabilitation.

Sur le plan financier, la préhabilitation peut permettre de réduire les coûts de soins à long terme en améliorant la santé des patients et en réduisant les risques de complications et de rechutes. Elle peut également contribuer à réduire le temps de séjour à l'hôpital et à accélérer la récupération des patients, ce qui peut entraîner des économies pour les hôpitaux et les patients. Une étude publiée dans le British Journal of Surgery en 2014 a comparé les coûts médicaux de patients soumis à une chirurgie de la prostate qui avaient reçu une préhabilitation chirurgicale à ceux qui n'en avaient pas reçu. Les résultats ont montré que les patients qui avaient reçu une préhabilitation chirurgicale avaient un temps de séjour à l'hôpital de 4,5 jours inférieur à celui des patients qui n'en avaient pas reçu.*Étant donné qu'une journée d’hospitalisation coûte en moyenne 1700 € dans un service de chirurgie cela représente une économie d'environ 7650€ par patient.*

Sur le plan médical, la préhabilitation peut améliorer la santé des patients et leur qualité de vie en renforçant leur capacité physique et mentale avant une intervention chirurgicale ou un traitement médical. Elle peut également contribuer à réduire les risques de complications et de rechutes, ce qui peut entraîner une récupération plus rapide et une meilleure qualité de vie à long terme. Par exemple, une étude publiée dans le Journal of the American Medical Association en 2016 a montré que la préhabilitation chirurgicale a réduit le taux de complications péri opératoires de 35% chez des patients subissant une chirurgie de l'œsophage.**

La "préhab" peut avoir un impact positif sur les indicateurs PROMS (Patient-Reported Outcome Measures) et PREMS (Patient-Reported Experience Measures).
Les PROMS sont des mesures de l'état de santé perçu par le patient, qui peuvent inclure des évaluations de la douleur, de la mobilité, de la qualité de vie et de l'autonomie. La préhabilitation chirurgicale peut améliorer ces indicateurs en optimisant la condition physique et fonctionnelle du patient avant l'intervention chirurgicale.
Les PREMS sont des mesures de l'expérience vécue par le patient pendant et après une intervention chirurgicale. La préhabilitation chirurgicale peut améliorer ces indicateurs en réduisant le temps de séjour à l'hôpital, en réduisant le taux de complications péri opératoires, en améliorant la prise en charge pre opératoire et la qualité de vie postopératoire.

Les difficultés à sa mise en place

  1. Manque de personnel : mettre en place des parcours de préhabilitation peut nécessiter l'embauche de personnel qualifié et spécialisé, ce qui peut être difficile si l'hôpital manque de personnel ou s'il est difficile de recruter du personnel qualifié.
  2. Manque de temps : les parcours de préhabilitation peuvent nécessiter beaucoup de temps et d'attention, ce qui peut être difficile à concilier avec les autres tâches et responsabilités des professionnels de santé.
  3. Coût : mettre en place des parcours de préhabilitation peut être coûteux, en particulier si l'hôpital doit embaucher du personnel supplémentaire ou s'il doit investir dans du matériel spécialisé.
  4. Manque de coordination : mettre en place des parcours de préhabilitation peut nécessiter une coordination étroite entre différents professionnels de santé et services, ce qui peut être difficile à mettre en place dans un établissement de santé.
  5. Barrières culturelles : certaines personnes peuvent être réticentes à participer à des parcours de préhabilitation, soit par manque de compréhension de leur utilité, soit parce qu'elles sont habituées à un modèle de soins plus traditionnel. Il peut donc être difficile de sensibiliser les patients à l'importance de la préhabilitation et de les inciter à participer.
  6. Manque de données : il peut être difficile de mesurer l'efficacité des parcours de préhabilitation, en particulier si l'hôpital ne dispose pas de suffisamment de données sur les patients et leur évolution au fil du temps.
  7. Évaluation des besoins : il peut être difficile d'évaluer les besoins de chaque patient de manière précise et de mettre en place des parcours de préhabilitation adaptés à leurs besoins spécifiques.
  8. Coordination avec d'autres soins : les parcours de préhabilitation doivent souvent être coordonnés avec d'autres soins médicaux rendant la coordination plus compliqué.
  9. Manque de soutien : mettre en place des parcours de préhabilitation nécessite l'obtention de soutien financier ou autre de la part de la direction de l'hôpital, ce qui peut être difficile à obtenir dans certaines situations.

En résumé, la préhabilitation peut avoir de nombreux bénéfices financiers et médicaux pour les hôpitaux et les patients. Elle peut aider à réduire les coûts de soins à long terme, améliorer la santé des patients et leur qualité de vie, et accélérer leur récupération. Malgré tout, elle nécessite un investissement en temps et une coordination pluridisciplinaire qui peut se relever difficile. 

*Prehabilitation Before Radical Prostatectomy: A Randomized Controlled Trial

**Prehabilitation Before Surgery in Older Adults, Rachel P. Davidson, M.D., M.Sc., et al., JAMA; 1775-1783, 2016

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